Labours d'autrefois
Des naseaux, s’échappe le souffle chaud
Qui se dissout dans les froids hivernaux.
Le souffle surgit à grandes volutes saccadées
Des bêtes puissantes et musclées.
Frileux petit matin d’automne
Salué par l’angélus qui sonne.
A l’aube de longues heures de sueur,
Sourient les traits du laboureur.
Son regard embrase voluptueusement le pré
Qu’avec sa charrue, il va pénétrer.
Il a déjà, bien des fois, fendu cette terre
Qui se réveille d’une longue jachère.
Le soc de la charrue l’a percée
De son long fil brillant et acéré.
Alors, profondément déchirée,
La motte jaillit de chaque côté.
Elle éclate, comme la vague sauvage
S’en vient rouler dessus la plage.
Le pudique peuple des haies a désavoué
L’accouplement sauvage de la terre et de l’acier,
Mais bientôt, à voir cette terre si jolie
Et si amoureusement saillie
Il s’est alors laisser griser
Par ces images sensuelles de lumière irisée.
Un frisson de plaisir s’est lentement glissé
Parmi les arbres, les oiseaux et les baies
Chênes et hêtres ont salué chaleureusement
D’un long et majestueux balancement.
Les oiseaux ont, à leur tour, lâché leurs pépiements
Comme commères, au lavoir, chantant…
Se sentant enfin admis par tout son voisinage
L’homme a bandé ses muscles davantage.
Le sabot du cheval s’est enhardi
Et, du sillon, a jailli la vie…..
Roland Vannier
Voutré (Mayenne), Années 1960/1964