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Le blog d'écriture de Roland
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9 octobre 2019

La Vérité est-elle encore une vertu ?

victor hugo "La vérité, ce jour de l'âme humaine."

 

Depuis la nuit des temps, et ce n'est pas à leur honneur, les humains mentent ou trichent parfois. Les politiques aussi, car non seulement ce sont des humains mais aussi parce qu’ils sont élus par des humains qui mentent et trichent.

Donc, il arrive que, comme nous, électeurs, les gouvernants mentent ou trichent. Au fond, on a les élus qu’on mérite. Petite anecdote pour illustrer cela: « J’attendais ma petite-fille, alors en 6e, près de l’entrée du collège. J’étais le premier arrivé. L’environnement était silencieux…Quand soudain, j’entends dans mon dos, à quelques dizaines de mètres de moi, une altercation qui enfle. Je regarde discrètement (deux employés de mairie) et j’écoute. Après les noms d’oiseaux fréquents dans les querelles, j’entends très distinctement : « Je te préviens que si tu continues à me faire ch… comme ça, je te dénonce à la Mairie pour tous les sacs de ciment que tu as piqués»…En m’éloignant discrètement, je me demandais, après avoir entendu cette altercation, si ces deux employés de la mairie, payés par les contribuables, se permettaient parfois l’audace de critiquer les gouvernants pour leur manque de probité et de transparence. Je me suis également demandé si des citoyens comme ceux-ci étaient nombreux ou non en France. »

Oui, en France, les gouvernants d’aujourd’hui mentent beaucoup moins que leurs prédécesseurs. Oh, non pas parce qu'ils seraient plus vertueux par nature que les précédents. Non, mais parce que le monde politique a été obligé, sous la pression des électeurs et des médias, de se plier à beaucoup plus de transparence qu'auparavant. Une transparence énoncée dans la loi, avec des contrôles légaux. Mais pas seulement grâce à la loi : Comme les médias se sont maintenant, volontairement acoquinés avec l’audimat, ils cherchent en permanence à flatter les auditeurs, téléspectateurs et lecteurs. Alors, ils investiguent sur les politiques, cible facile qui reçoit toujours un aussi grand succès dans les bistrots ou les discussions près de la machine à café.

Donc, les gouvernants, aujourd’hui, sont non seulement soumis à l’obligation de transparence mais ils ont aussi tout intérêt à être de plus en plus transparents car les contrôles légaux et médiatiques se multiplient.

 Alors, oui, aujourd'hui, je le réaffirme: j’ai la conviction que les gouvernants, sous la menace, il est vrai, des instruments légaux de contrôle et des médias de plus en plus à la recherche d’exclusivité, mentent et trichent beaucoup moins que les précédents qui n’étaient pas soumis à ces contraintes…

Pourtant, ce qui est paradoxal, c'est que, depuis environ deux ans, les partis politiques d'opposition mentent et trichent beaucoup plus qu’avant. Et ce, sans vergogne, sans scrupules: mensonges, montages d'images, sortie de propos de leur contexte, infox. Il faut dire qu’ils n’ont que très peu de contraintes légales de transparence. Seuls quelques médias investiguent parfois sur leurs pratiques, mais si peu. Vraiment trop peu pour que ces politiques opposants remplissent leur rôles de façon aussi honnête et transparente que les gouvernants.

Les citoyens, quant à eux, avaient trouvé dans les gouvernants d’autrefois, encore à l’abri de la transparence, des boucs-émissaires idéaux pour déverser sur eux leur mal-être (réel ou pas). Malheureusement pour eux, l’exigence de transparence arrive. Donc, des affaires éclatent. Des affaires qui n’auraient pas éclaté auparavant. Tout le monde devrait en être heureux : l’exigence de transparence porte ses fruits.

Mais, étonnamment de mauvaise foi, plutôt que reconnaître que la mise à jour de ces « affaires » est due aux éxigences de transparence, voilà que, parmi le peuple, la populace* déduit que, du fait que s’il y a un plus grand nombre d’affaires révélées, cela prouve que les gouvernants n’ont jamais été aussi « pourris », comme disent les gens qui savent que la généralisation (un seul mot imprécis, très large et qui ne veut rien dire: « pourri ») les met à l’abri d’une argumentation factuelle qu’ils sont incapables de développer.

Qu’arrive-t-il alors ? …Cette transparence, exigée il y a quelques années par tous, mécontente les opposants politiques, les médias mais aussi les citoyens. En effet, s’il n’y a plus de grosses affaires, de gros scandales à révéler, où donc les opposants vont-ils trouver leurs armes pour blesser les gouvernants ? Comment les médias vont-ils pouvoir faire des offrandes au dieu Audimat s’ils n’ont plus d’exclusivités choquantes à proposer à leurs voyeurs ? Et puis, vers quels boucs-émissaires, la populace va-t-elle pouvoir diriger sa rancœur et sa haine ?

Eh bien, leur réconfort va se trouver dans un phénomène nouveau…. Enfin, pas tout à fait nouveau. Mais nouveau tout de même depuis environ 80 ans.

J’étais profondément convaincu que cela ne pouvait pas revenir mais mon raisonnement faisait fi de la bêtise, de la méchanceté, de l’ignorance et de la malhonnêteté.

Quand cette gangrène, il y a quelques dizaines d’années, est réapparue, elle était toute petite. La grande majorité des Français, dont je suis, l’a méprisée, ignorée. Une petite bête de la taille d’un moustique, ça fait sourire. Mais cette petite bête portait en elle un venin contagieux et, pour ne l’avoir jamais connue, on l’a sous-estimée… jusqu’en 2002. 2002,c’est l’année où cette gangrène au visage grimaçant de haine, est apparue au premier plan, sur la scène politique nationale. Devant cette menace, presque tout le peuple français s’est rassemblé pour l’écraser. Les valeurs morales avaient encore cours. Et quand cela fut –apparemment- fait, nous l’avons de nouveau ignorée.

Mais la bêtise, la méchanceté, l’ignorance et la malhonnêteté étant toujours bien vivantes, la bête s’est requinquée jusqu’à remporter les élections européennes de 2014. Je me souviens des plateaux TV de toutes les chaînes, le soir de ce triste jour. Tous, je dis bien tous les politiques présents étaient décontenancés. Tous ont alors affirmé : il nous faut faire de la politique « autrement ». Et tous étaient d’accord pour que, « dès demain, nous, politiques, nous nous remettions en question ». Mais finalement, rien ne changea. Ils ne firent rien, voire même, ils finirent par s’accommoder et parfois jusqu’à flatter et côtoyer la bête qui proliférait. D’autres, impuissants, ne sachant comment s’y prendre, baissèrent les bras.

Et puis, sont arrivées les élections présidentielles de 2017.

Tous ces anciens élus, appartenant à un parti politique, ayant patiemment gravi les échelons se retrouvent battus par « un jeune homme républicain, ni de gauche ni de droite, venu d’on ne sait où, jamais élu, n’ayant appartenu à aucun parti… ». Déjà ébranlés par 2014 qu’ils ont préféré mettre sous le tapis, voilà que ces mêmes politiciens prennent en pleine figure l’explosion de la division gauche/droite, pourtant déjà bien malmenée depuis quelques années mais maintenue artificiellement.

La majorité de ces élus, au formatage ancien, a eu une réaction républicaine : les plus clairvoyants se sont retirés de la politique. D’autres ont intelligemment remis en cause leur formatage.

Mais malheureusement, quelques-uns n’ont rien voulu entendre. Et pour cela, ils sont allés jusqu’à jeter leurs valeurs républicaines… Ils sont entrés dans des oppositions immatures et aussi stériles que violentes. Et pour tenir sur la longueur, ils ont même trahi des valeurs personnelles qu’on est en droit de penser qu’ils les possédaient auparavant. Dépourvus d’idées politiques, de stratégie, de projets d’avenir pour la France, ils se sont entièrement consacrés à détruire, à s’opposer à tout, à tous les gouvernants et par tous les moyens, notamment la malhonnêteté, le mensonge, la mise en scène truquée. La vérité leur importait peu.

On aurait pu penser que les médias n’allaient pas tomber dans le panneau de ces extrêmistes sans foi ni loi. Mais c’était sans compter sur le fait que beaucoup de journalistes en place avaient leurs petites habitudes avec les anciens gouvernants, leurs petits privilèges, leur rond de serviette, les confidences qu’on leur faisaient « en toute amitié ». Et puis chacun de ces journalistes exerçaient leur métier en ayant toujours en tête cette bonne vieille dichotomie « gauche/droite » bien pratique, comme un phare les guidant, tels des marins. En outre, eux aussi avaient appris leur métier avec un formatage qui datait de plusieurs dizaines d’années.

Si quelques médias, comme certains politiques, eurent l’intelligence de s’adapter, un bon nombre n’a surtout rien voulu changer. Surtout ne pas s’adapter. « Quoi ? Nous, le Quatrième Pouvoir, on nous méprise, on nous met au rencard, on ne flatte plus notre ego ?... Alors, ceux-là se sont, implicitement, solidarisés avec les politiciens ayant abandonné leurs valeurs républicaines. Un bon nombre de journalistes est alors entré en « résistance » contre le changement, quitte à s’asseoir parfois sur l’éthique journalistique.

Un bon nombre de médias s’est alors satisfait, voire réjoui, de toutes les attaques personnelles contre les gouvernants, les parlementaires... Ils se sont accommodés de l’absence de propositions constructives de la part des opposants « destructeurs ». Ils ont même, de façon hypocrite, laissé passer des infox.

Et les citoyens que nous sommes dans tout cela ? Eh bien, comme la majorité des politiques, nous avons su "plus ou moins..." nous adapter, prendre du recul. Choisir dans ce nouveau contexte.

Cependant, pour un nombre important de citoyens qui soutiennent la « bête », ça n’a rien changé. Au contraire : ils ont pris une place de choix dans le paysage politique. Ils sont de plus en plus médiatisés et, de ce fait, dédiabolisés. Et comme ils n’ont jamais existé que par l’invective, l’insulte, les infox, le mensonge, la malhonnêteté, la démagogie, dans lesquelles ils sont experts, ils n’ont rien eu à changer. Ils sont au contraire dans leur élément. Les vents leur sont favorables.

Et ils ne restent pas inactifs. L’acquisition de soutiens de puissances étrangères comme la Russie ou les Emirats Arabes Unis. Et puis, ils ont aussi fabriqué, il y a un an, un soutien interne : ce soi-disant mouvement « spontané » des « gilets de panne d’auto ». Ils l’avaient préparé depuis 2017 en essaimant au travers du pays, de petits groupes discrets. Et quand la bête a lâché les chiens jaunes qui n’attendaient que ça, ils sont sortis avec l’étiquette médiatique d’un « mouvement spontané jailli de Facebook » (jolie infox). La bête avait bien choisi son moment : les retraités étaient en colère à cause de l’augmentation de la CSG, certains, IPone à la main, s’estimaient pas suffisamment reconnus, d’autres étaient réellement dans la difficulté financière. Les ont rejoint bien sûr les rebelles par nature, les zadistes, les anarchistes ...Tout cela fit du monde pendant 2 mois.

Cependant, c’était sans compter avec les médias qui, dans ce nouveau contexte où les valeurs morales s’effritent, virent là l’occasion de s’imposer: Faire de gigantesques offrandes au dieu Audimat. Ce fut particulièrement vrai pour les chaînes émettant en continu. Ce fut aussi une bonne occasion pour la Russie de déverser sa propagande poutinienne contre la France au travers de deux chaînes russes émettant en Français.

Et puis, ce fut également un petit peu l’occasion d’une vengeance infantile de quelques journalistes extrêmistes envers ceux qui ne les flattent plus.

 

Que tirer comme conclusion de tout cela ? …

Les nouveaux dirigeants font leur boulot avec des réussites et des échecs. Des erreurs de jeunesse également. Mais ils le font, contraints et forcés dans la transparence, et la vérité est beaucoup plus au rendez-vous aujourd’hui qu’auparavant.

Les médias qui, pour certains, se sont sentis bafoués, courent de plus en plus derrière l’audimat. Ils courent également derrière les réseaux sociaux, qui, s’il y a dix ans, étaient bon enfant, sont aujourd’hui, à l’heure des  abrutis qui se prennent pour des experts. Ces réseaux sociaux sont devenus, pour une grande partie, une énorme déchetterie sans recyclage, où se déversent la haine, le mensonge, les infox (fake news pour les snobs), les manipulations. C’est également devenu le déversoir mondial de l’humeur de certains politiciens éjaculateurs précoces.

Alors, les médias, voulant aller aussi vite que les réseaux sociaux, vérifient de moins en moins leurs infos, « balançant » de ce fait, de temps en temps, des infox. Continuant de soutenir le « mouvement spontané » devenu une cour des miracles de petits bandits, ils cautionnent leur violence et leurs mensonges. Et donc aussi le rapport à la vérité.

 

Et les Français qui vivent leur quotidien sans se poser ce genre de questions, où en sont-ils de leur perception du rôle des gouvernants, des médias et des partis politiques ?

Je pense qu’ils ne soupçonnent pas un seul instant que leur TV préférée véhicule des approximations, qu’elle s’arrange avec la vérité, qu’elle ne sait plus –ou ne veut plus- établir des priorités dans l’importance des informations. Ils lui font malheureusement confiance. C’est dramatique.

En ce qui concerne les gouvernants et les parlementaires, médias et partis politiques continuant de leur tirer dessus, même pour de petits évènements qu’ils ne manquent pas de monter en épingle, la majorité des Français, malgré les évidents changements, restent bien volontiers sur cette croyance que les gouvernants sont malhonnêtes (eux n’ayant bien sûr rien à se reprocher) et continuent de prononcer ce gimmick affligeant : « tous pourris ».

 

Mais dans ce monde public où les informations ne sont pas toujours (souvent ?) vraies, dans ce monde où le mensonge a presque atteint la même valeur que la vérité, dans ce monde où la quantité d’informations est telle que la plupart des gens est submergée, je sens que le Peuple français (je ne parle pas de la populace violente) est perdu, fragile et plus influençable que jamais. J’ai peur qu’ainsi, il ne soit perméable, comme jamais, à des idées qui pourraient entraîner la France vers des situations similaires à celles que nos ancêtres ont connu il y a quatre vingt ans.

Quand, dans une Société, on donne la même valeur au mensonge qu’à la vérité, alors la démocratie ne tient plus qu’à un fil.

 

Roland Vannier

Perpignan le 8 octobre 2019       

 

*Populace : J’emploie ce terme au sens où l’employait Victor Hugo : la populace ne désigne spécifiquement ni des gens pauvres ni des gens peu instruits mais des gens de toutes classes qui ne savent que détruire et projeter leur haine.

 

 

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