Maisons d'un autre âge
La tête affaissée, elle dort profondément,
Mains froissées, posées sur ses maigres cuisses.
Sa tête tombante entraîne son corps vers l’avant
Poussé par un sommeil jusqu’ au fond des abysses.
Elle est là, seule, immobile au fond d’un couloir vide,
Vide de vie malgré la présence d’un autre vieillard.
Tous deux enfermés dans cette maison de vieillesse
Où on ne sait plus très bien s’il est très tôt ou trop tard.
Leurs fauteuils roulants également assoupis, face à face.
Ni soupir ni parole ne brisent ce lourd silence de glace.
Leur conscience s’est enfuie vers d’autres univers.
Elle a les yeux fermés, lui a les siens grands ouverts.
Mais même ouverts, ses yeux ne voient plus la lumière.
Son regard fixe s’échappe tristement de ses yeux verts,
Son regard bouleversant d’absence ne regarde rien
Ou plutôt semble, à nos yeux de visiteurs, ne regarder rien.
Dans ce couloir lumineux au décor avenant et coquet,
Les deux corps avachis et distordus restent muets.
Une porte s’ouvre dans un couloir voisin. Prudemment...
Des pas fatigués et une canne s’éloignent lentement…
Roland Vannier
Perpignan le 3 octobre 2018