Lettre ouverte à François Hollande

Lettre ouverte à Monsieur François Hollande

Président de la République française de 2012 à 2017

Monsieur le Président de la République,

Vous réinvestissez depuis quelque temps la scène médiatique. Les médias télévisés, toujours avides de petites phrases, de scoops, de méchancetés et de règlements de comptes, vous tendent bien volontiers leurs micros.

J’ai voté pour vous en 2012 car j’attendais que le candidat du PS nous épargne un second mandat du président Sarkozy, et en l’absence de Monsieur Strauss-Kahn, j’ai donc porté mon choix sur votre candidature. Sans trop d’illusions car j’avais l’image d’un homme politique –pardonnez-moi- hésitant, voulant plaire à tout le monde, et semblant avoir des difficultés à décider.

Quand vous avez été élu, j’ai été heureux, non pas avec l’émotion que j’avais ressentie lors de l’élection du président Mitterrand, mais j’en étais très heureux. Le candidat du PS que vous étiez avait écarté le président Sarkozy.

Vous avez effectué votre quinquennat avec beaucoup d’hésitations, prévisibles, quand on sait que vous êtes toujours à la recherche du consensus, alors que cette façon de fonctionner s’oppose radicalement au fonctionnement et à la culture de notre pays.

Vous avez cependant eu le courage de résister, et ne pas vous laisser aller à une redistribution béate qui serait venue bien trop tôt et aurait enfoncé davantage la France. Vous avez su faire preuve du pragmatisme qu’on trouve chez les socio-démocrates, fussent-ils au prix des critiques et invectives  aveugles et irresponsables des « frondeurs » et d’un Mélenchon portant plus d’importance à son ego qu’à sa nation. Ces gens-là ont d’ailleurs été les premiers fossoyeurs du Parti Socialiste.

Vous avez également eu du courage face au terrorisme, que ce soit à l’intérieur du pays ou à l’étranger.

Vous n’avez, par contre, pas réussi à être un « président normal », en tout cas, pas au sens où vous l’entendiez. Des relations amoureuses agitées, des choix de communication hasardeux (« Monsieur tout le monde débraillé » sur la plage, l’affaire Léonarda, etc…) ont ramené votre « normalité » souhaitée à celle d’anormalité du président Sarkozy.

Les élections de 2017 ont accouché de résultats encore jamais vus sous la Ve République : Ni gauche, ni droite, mais un président « En même temps » auquel personne ne croyait. Et vous non plus. Votre ex-ministre pour lequel vous aviez beaucoup d’admiration (il est effectivement extraordinairement brillant), vous a faussé compagnie et vous a, en tout cas, à vos yeux, trahi.

Le but de cette lettre ouverte, Monsieur le Président, n’est pas d’avoir l’audace de faire le bilan complet de votre quinquennat mais de vous faire savoir combien vous décevez un certain nombre de gens comme moi depuis la fin de ce mandat.

Que vous ayez de la colère, voire de la haine, contre Emmanuel Macron serait parfaitement humain pour tout citoyen « normal ». Que vous pensiez que l’extrême droite n’a jamais été aussi proche du pouvoir, beaucoup de citoyens Français « normaux » le savent aussi et, comme vous, le redoutent.

Mais, Monsieur le Président, vous n’êtes pas un citoyen ordinaire: vous avez été Président de la République française et que, de l’honneur que vous ont fait des millions de Français en vous ayant ainsi élu, découlent des devoirs que vous devez respecter.

Un ancien président de la République ne devrait pas dire, écrire, faire « ça »(pour plagier le titre du livre des journalistes du Monde). « Ça », c’est « affirmer que l’extrême droite ARRIVERA au pouvoir en 2022 ou plus tard ». C’est indigne. Moi-même, je sais qu’il y a de fortes probabilités mais jamais je n’emploierai, comme vous le faites, ce futur « certain ». Je me battrai de toutes mes forces pour que cela n’arrive pas. Vos propos, ainsi formulés, sont choquants et trahissent la dignité attendue d’un ancien président.

Par ailleurs, que vos sentiments envers Emmanuel Macron fassent encore souffrir votre ego, je veux bien l’admettre, mais, en qualité d’ancien président de la République, vous avez le DEVOIR de passer outre ces sentiments personnels, pour limiter votre expression à des critiques pondérées et factuelles. Mélanger les sentiments et les faits, ce n’est pas digne de votre ancienne fonction.

Pour moi, un ancien président de la République se doit de revêtir un habit de sagesse et un engagement sans faiblesse pour que la nation qu’il a précédemment servie, réussisse, quelque soient les dirigeants qui l’ont écarté. A la condition, bien sûr, qu’ils soient de vrais Républicains.

Votre quinquennat est terminé Monsieur Hollande. Vous avez fait ce que vous avez pu.

S’il vous plaît, ne donnez pas l’impression d’un ancien dirigeant bien peu sage, qui court derrière des manifestations d’amour et de reconnaissance qu’il estime ne pas avoir suffisamment reçus à l’issue de sa mission. L’Histoire s’écrira sur vos cinq ans de quinquennat. Pas sur une pitoyable prolongation.

S’il vous plaît, attachez vous à courir derrière davantage de sagesse, plutôt que courir derrière les caméras et les marques d’affection.

S’il vous plaît, admettez que le rôle d’un ancien président de la République n’est pas de démolir ses successeurs. Il n’est pas non plus de les aider à briller personnellement. Mais si ces dirigeants respectent eux-mêmes la République, il est de son devoir de tout faire pour les aider, par l'expérience acquise, mais hors de la lumière médiatique, à faire réussir notre pays, la France. A contribuer ainsi, discrètement, à lui donner un avenir lumineux pour ses enfants.

Puisque je ne suis qu’un simple citoyen, dont l’avis n’importe pas plus que celui des 67 autres millions de citoyens, vous ne lirez pas cette lettre ouverte. Cependant, je garde l’espoir que vous parviendrez, par vous-même, à comprendre qu’il est temps, pour vous, d’aller vers plus de sagesse et de cesser d’ajouter aux piètres leaders stériles de l'opposition actuelle, des invectives et critiques personnelles issues d’un esprit de revanche infantile.

Je persiste à croire que vous finirez par prendre le chemin de l’aide que vous devez d’abord à la France et l'attention que vous devez aux Français qui vous avaient porté au sommet de l'Etat, afin d’éviter le pire, malgré ces horizons obscurcis, en joignant vos forces à ceux qui agissent dans le respect de la République.

 Roland Vannier

Perpignan le 3 avril 2019

Comments

[Nadine Babout]

J'ai partagé cette lettre ouverte avec mes amis. Je l'ai lu avec beaucoup de plaisir. Je vous remercie.

Cordialement

[annie]

merci toujours aussi précis je suis d'accord avec vous et bravo pour cette lettre ouverte que monsieur hollande devrait lire pour qu'i revienne à la raison